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Le conseil des ministres a réglé hier la question de la
Comédie-Française et celle de l' Opéra-Cornique.
M.
Barthou,
président du conseil et ministre de l'instruction publique, a
fait connaître au conseil qu'il allait soumettre à la signature
du Président de la République un décret nommant
M. Albert Carré administrateur général
de la Comédie-Française,
en remplacement de M. Jules Clarétie, dont la
démission a été acceptée et qui sera nommé
administrateur général honoraire.
M. Louis Barthou a, en outre, annoncé au conseil
la décision qu'il avait prise, sur la proposition du sous-secrétaire
d'État des beaux-arts, de nommer directeurs du théâtre
de l'Opéra-Comique, pour
une période de sept années, à compter du 15 novembre
1913, MM. Gheusi et Isola.
M. Paul Vidal, premier
chef d'orchestre de l'Opéra,
sera chargé de la direction de la musique à l'Opéra-Comique.
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M. Gheusi est un malin,
un diplomate auprès de qui nos professionnels du quai d'Orsay sont
de débiles mazettes. S'il voulait s'en donner la peine, il roulerait,
comme une cigarette, M. de Selves (homme
politique né à Toulouse) lui-même, que
les annales des Affaires étrangères célèbrent
à l'égal de M. de Talleyrand. D'ailleurs,
M. Gheusi n'est-il pas de Toulouse ?
Empêtré, de par la volonté de M. Viviani,
de la collaboration des frères Isola,
M. Gheusi a commencé par faire le vide
autour des infortunés frères siamois de la direction puis,
quand il les vit isolés et momifiés par l'inaction où
il les réduisait, il les escamota, simplement. Et ce tour, était
très difficile à exécuter. Car, on se souvient que
les frères Isola, avant d'administrer nos théâtres
subventionnés, étaient prestidigitateurs, et qu'ils gagnaient
leur vie, très largement du reste, à "faire
passer une montre du gousset d'un spectateur dans le corsage d'une
spectatrice ; à "changer de l'eau
en vin" ; ou à "écraser à
coups de marteau une bague que l'on retrouve ensuite
pendue par un ruban bleu au cou d'une colombe".
Les frères Isola connaissaient tous les trucs de leur art, et cependant,
ils se sont laissé escamoter sans y prendre garde.
Si vous voulez vous en convaincre, allez à l'Opéra-Comique,
et demandez à parler aux chers disparus. Personne ne pourra vous
indiquer l'endroit où ils abritèrent leur désespoir
de n'avoir rien à faire. Le concierge l'ignore; à la Régie,
on nous envoie chez M Gheusi ; les artistes pensent qu'ils doivent être
encore à la Gaité-Lyrique.
Seule,
la préposée aux W.-C. me donna un espoir. C'est par
là, je crois, me dit-elle avec un sourire et un geste engageants.
J'ouvris une porte, Horreur ! J'étais sur le domaine de l'astucieuse
préposée, qui avait médité de me faire consommer
par ruse. Et les frères Isola n'étaient même pas là
!
Une
enquête s'impose. M. Gheusi n'a pas le droit, tout Toulousain qu'il
est, de supprimer des collaborateurs choisis contre mille par le Ministre
lui-même. Qu'il dise ce qu’il a fait des frères Isola.
Il nous faut les cadavres !
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