LES THÉÂTRES SUBVENTIONNÉS
M. ALBERT CARRÉ
ADMINISTRATEUR DU THÉÂTRE-FRANÇAIS
MM. GHEUSI & ISOLA
DIRECTEURS DE L'OPÉRA-COMIQUE
Source Gallica
 
 
         
LE JOURNAL
17/10/1913
   
         
 

        Le conseil des ministres a réglé hier la question de la Comédie-Française et celle de l' Opéra-Cornique.
       
M.
Barthou, président du conseil et ministre de l'instruction publique, a fait connaître au conseil qu'il allait soumettre à la signature du Président de la République un décret nommant M. Albert Carré administrateur général de la Comédie-Française, en remplacement de M. Jules Clarétie, dont la démission a été acceptée et qui sera nommé administrateur général honoraire.
         M. Louis Barthou a, en outre, annoncé au conseil la décision qu'il avait prise, sur la proposition du sous-secrétaire d'État des beaux-arts, de nommer directeurs du théâtre de l'Opéra-Comique, pour une période de sept années, à compter du 15 novembre 1913, MM. Gheusi et Isola.
      M. Paul Vidal, premier chef d'orchestre de l'Opéra, sera chargé de la direction de la musique à l'Opéra-Comique.


   
01/05/1914
 
Source
Gallica
 
            M. Gheusi est un malin, un diplomate auprès de qui nos professionnels du quai d'Orsay sont de débiles mazettes. S'il voulait s'en donner la peine, il roulerait, comme une cigarette, M. de Selves (homme politique né à Toulouse) lui-même, que les annales des Affaires étrangères célèbrent à l'égal de M. de Talleyrand. D'ailleurs, M. Gheusi n'est-il pas de Toulouse ?
             Empêtré, de par la volonté de M. Viviani, de la collaboration des frères Isola, M. Gheusi a commencé par faire le vide autour des infortunés frères siamois de la direction puis, quand il les vit isolés et momifiés par l'inaction où il les réduisait, il les escamota, simplement. Et ce tour, était très difficile à exécuter. Car, on se souvient que les frères Isola, avant d'administrer nos théâtres subventionnés, étaient prestidigitateurs, et qu'ils gagnaient leur vie, très largement du reste, à "faire passer une montre du gousset d'un spectateur dans le corsage d'une spectatrice ; à "changer de l'eau en vin" ; ou à "écraser à coups de marteau une bague que l'on retrouve ensuite pendue par un ruban bleu au cou d'une colombe".
             Les frères Isola connaissaient tous les trucs de leur art, et cependant, ils se sont laissé escamoter sans y prendre garde.
             Si vous voulez vous en convaincre, allez à l'Opéra-Comique, et demandez à parler aux chers disparus. Personne ne pourra vous indiquer l'endroit où ils abritèrent leur désespoir de n'avoir rien à faire. Le concierge l'ignore; à la Régie, on nous envoie chez M Gheusi ; les artistes pensent qu'ils doivent être encore à la Gaité-Lyrique.
        Seule, la préposée aux W.-C. me donna un espoir. C'est par là, je crois, me dit-elle avec un sourire et un geste engageants. J'ouvris une porte, Horreur ! J'étais sur le domaine de l'astucieuse préposée, qui avait médité de me faire consommer par ruse. Et les frères Isola n'étaient même pas là !
            Une enquête s'impose. M. Gheusi n'a pas le droit, tout Toulousain qu'il est, de supprimer des collaborateurs choisis contre mille par le Ministre lui-même. Qu'il dise ce qu’il a fait des frères Isola. Il nous faut les cadavres !