
Article du
journal "LE JOURNAL" du dimanche 26 mars 1939
On sait que les frères Isola, après
avoir présidé comme directeurs aux destinées de
plusieurs scènes théâtrales, notamment de la Gaîté-Lyrique,
de l'Opéra-comique et de Mogador, ont repris leur fameux numéro
d'illusionnistes par quoi ils s'imposèrent à la notoriété
publique.
M. Émile Isola vient de s'aviser qu'il n'avait
plus le loisir de veiller sur les collections patiemment recueillies
au cours de près d'un demi-siècle.
- Ce n'est pas sans mélancolie,
a-t-il dit, que je disperse au feu des enchères publiques tant
de souvenirs ; mais ne suis-je pas redevenu un grand voyageur ? Un artiste
nomade ne peut guère s'entourer d'un musée.
Et hier, dans une grande
salle de Saint-Cloud, place Georges-Clemenceau, le Tout-Paris se pressait
autour de riches reliques qui emplissaient l'appartement de la rue La
Boétie.
C'était
le premier jour de la vente.
Il y avait
là trente années de théâtre parisien représentées
par une collection unique de documents, de volumes, de pièces,
des manuscrits. Dans de hautes bibliothèques dormaient des romans
célèbres dédicacés par les grands auteurs.
Des autographes
nombreux, parmi lesquels on remarque ceux de Paul Doumer,
Gaston Calmette, d'Ambroise Thomas,
de Courteline, de Mme Joffre, de Massenet,
de Saint-Saëns, de Vincent d'Indy...
Plus loin, dans un coin de la salle, s'alignent des toiles dont quelques
unes nous rappellent par la signature que le violon d'Ingres de M. Émile
Isola était la peinture.
Des curieux, des collectionneurs
erraient parmi ces souvenirs, Mais le marteau sonore du commissaire-priseur
tombait de temps à autre, chassant les fantômes mélancoliques
MARCEL PETIT.