Source Gallica
PARIS-MIDI DU DIMANCHE  14 FÉVRIER 1937

 

LE GRAND SUCCÈS DE
LA NUIT DU SPECTACLE


            On a dansé ce matin, vers les trois heures, aux Folies-Bergère. Rien de nouveau à cela, direz-vous. On danse tous les soirs sur la scène.
         Mais justement c'est qu'on fox-trottait dans le grand hall entre spectateurs et spectatrices. Ce bal inattendu terminait « La Nuit du Spectacle », première fête annuelle organisée par quatre grandes associations du spectacle, les administrateurs, les secrétaires généraux, les régisseurs et les chefs de contrôle, c'est-à-dire tous ceux qui secondent les directeurs de théâtre dans leur tâche ardue.
           On se doute bien que le spectacle qui commença à minuit fut des plus brillants. Et Victor Boucher et Fernandel et Mary Marquet et Joséphine Baker se succédaient « sur le plateau ».
          On fit un grand succès notamment à M. Sessue Hayakawa, l'éternel suicidé qui, pour la première fois depuis sa réapparition à Paris, se montrait au public. Nul doute n'était plus possible. C'était bien lui en chair et en os, et pour nous donner une idée de l'art dramatique japonais, il récita, après avoir été présenté par Germaine Aussey, un petit speech, à moins que ce ne soit un petit monologue, en japonais, au cours duquel on put admirer ses dons de mime.
            M. Emile Isola présenta ses silhouettes animées. On se demandait s'il avait fait disparaître son frère avec trop de maestria, mais il annonça que ce dernier était à Cannes, ajoutant qu'il était fort ému car, Il y a juste cinquante ans, il faisait ses débuts de prestidigitateur aux Folies-Bergère, précisément.
     On reconnaît Pauline Carton, les frères Isola, Victor Boucher, Lefaur, Sessue Hayakawa, Joséphine Baker, Marie Glory, Fernandel, Rosine Deréan, Parysis (probablement)

  Dans la salle, la grande famille du spectacle était là au complet. Régisseurs, contrôleurs; secrétaires généraux, tous ces messieurs de la boîte à sel, qui savent porter le smoking, ravis de se trouver réunis, ne ménageaient pas leurs applaudissements et ne paraissaient pas blasés le moins du monde. M. Huisman, directeur des Beaux-Arts, représentait le monde officiel, et Mlles Parysis, Cocéa, Darrieux éblouissaient de leurs élégances. « La Nuit du Spectacle » fut le triomphe de la solidarité et de l'organisation.
                                                                       Jean-Jacques Brissac